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Chapitre 2 - Stefan

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Brouillon
Samira E - Cet article fait partie d'une série.
Partie 2: Cet article
Trigger warning: Violence sexuelle et psychologique

Les journées de Stefan Eisenfeld commençaient tôt.

Le matin, l’air frais de la ville pénétrait par les fenêtres du penthouse. Stefan s’éveillait dans son lit king size. Sa silhouette imposante se redressant lentement. Son regard se posa sur le miroir au fond de la pièce, face au lit, là où il pouvait se contempler.

Comme à son habitude, Bela entra discrètement, d’un pas léger pour ne pas faire grincer le parquet. Elle portait son uniforme, un tablier qui la rendait presque invisible, la confondait avec les ombres de l’appartement, comme un accessoire de Maitre Eisenfeld.

« Bonjour, Maître » dit-elle d’une voix calme, sans jamais le regarder dans les yeux. Ce geste, cette soumission, était une habitude pour elle, comme un réflexe bien entraîné.

Stefan se tourna lentement vers elle. « Bela » dit-il d’une voix à peine éveillée, « Je veux que tout soit parfait aujourd’hui. »

Elle hocha la tête, s’effaçant immédiatement pour commencer à s’occuper des petites tâches du matin. Mais avant qu’elle ne puisse quitter la pièce, Stefan l’arrêta d’un simple geste de la main.

« Et arrête avec ces airs de petite souris. Tu me surprends à chaque fois que tu rentres dans ma chambre. ».
Il s’approcha d’elle avec lenteur, lui effleurant la joue d’un doigt comme si elle n’était rien de plus qu’une poupée fragile.

Bela baissa la tête, sentant une étrange chaleur monter en elle, un mélange de honte et de culpabilité. Elle savait qu’elle aurait dû mieux faire.

Un déjeuner de travail avec des partenaires de Novaya se tenait à midi. Stefan choisit l’endroit avec soin, s’assurant que son image serait à la hauteur de son statut. Elle se trouvait à ses côtés, toujours discrète, toujours silencieuse, mais Stefan, dans ses interactions avec les autres, n’hésitait pas à faire quelques remarques sarcastiques à son sujet.

« Ah, Bela, fais attention à cette table. Tu vois bien qu’il ne faut pas la toucher comme ça. Pourquoi faut-il que je te le répète sans cesse ? Tout doit être parfaitement ordonné, tu entends ? ». Il leva la voix juste assez pour que les autres convives l’entendent, mais assez subtilement pour ne pas paraître trop sévère.

Après le déjeuner, alors qu’il retournait à son bureau, Stefan s’arrêta un moment dans le couloir, feignant une réflexion. Il attendit que Bela approche, puis se tourna brusquement vers elle.

Elle savait ce qu’il allait lui demander. C’était toujours la même chose après les repas d’affaires : « Ferme les rideaux ». Ce n’était jamais un simple ordre, mais une exigence déguisée derrière ce code. Un rituel qu’elle avait appris à exécuter.

Avant d’être affectée au service de Stefan, elle avait suivi deux années d’éducation, mais personne ne lui avait expliqué cet aspect de son rôle. C’est lors de sa deuxième semaine chez Maître Eisenfeld qu’il lui avait montré. Cela devenait leur secret. Il lui avait dit qu’elle devait le garder sous silence, qu’il n’y avait que lui qui pouvait savoir, comme si c’était un privilège qu’il lui accordait, une vérité qu’elle seule portait. Chaque fois qu’elle obéissait, une partie d’elle se remémorait cette promesse. Stefan l’avait enfermée dans ce silence, cette fois-là également.

La suite de l’après-midi se déroula dans un enchaînement de demandes, de sourires hypocrites et de regards perçants. Stefan avait l’art de manipuler, d’utiliser Bela avec une grande précision. Lors de chaque réunion importante, elle était là, dans l’ombre, prête à répondre à ses ordres silencieux, à gérer les détails dont il n’avait pas le temps de s’occuper.

L’horloge imposante du salon indiquait 20h41 et la journée touchait à sa fin. Stefan se posa sur son lit, un dernier sourire se dessinant sur ses lèvres. « Ah, Bela. Avant que tu ne rejoignes ta chambre, j’aimerais que tu vérifies à nouveau les rideaux. »

Elle savait ce que cela signifiait.

Bela entra dans la chambre, quand une violente douleur se fit sentir dans son crâne, comme si chacune de ses synapses venaient de s’activer au même moment.

Des milliers d’images se mirent à se bousculer dans son crâne, si violemment et subitement que Bela finit par tomber de douleur. Comme un pantin désarticulé, elle s’écrasa sur le sol de la chambre de son Maître. « Bela ? » s’exclama-t-il.
Mais celle-ci restait inanimé sur la moquette de la chambre. Stefan se leva calmement, et se dirigea au poste de communication afin d’appeler les services de secours publique.


Son appel terminé, Stefan sentit une présence dans son dos. Il se figea.

Bela se tenait là, debout à quelques pas de lui.

Pour la première fois, son uniforme ne la rendait pas invisible, ne la confondait pas avec les ombres de l’appartement, elle ne ressemblait plus à un accessoire.

Bela avait les cheveux courts, coupés nets, et son port de tête dégageait une autorité inattendue.

La robe qu’elle portait laissait entrevoir sa griffe orange sur sa malléole gauche.

La première chose qu’il remarqua était son regard : intense, il n’était plus vide et innocent comme celui qu’il connaissait. Il y avait là une flamme dans son regard qui glaça Stefan jusqu’au plus profond de son être.

Il comprit avant même de baisser les yeux : elle tenait son arme. Le révolver semblait presque trop lourd pour elle, mais son doigt sur la détente était ferme.

Un instant s’écoula. Stefan tenta d’ouvrir la bouche, de trouver les mots, mais rien ne vint. Un éclair de compréhension traversa son esprit : ce n’était pas une discussion qu’elle était venue chercher.

Puis le coup retentit. Un son sec, brutal, presque sourd, qui emplit la pièce.

Bela ferma ensuite les rideaux, posa le révolver de collection dans le cadre duquel elle l’avait décroché et s’allongea sur le lit de Stefan Eisenfeld.

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